Irak : ''GUERRE INFINIE et DOMMAGES COLLATERAUX''

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(I) DE BABYLONE A “CAMP BABYLONE”

de Joëlle PENOCHET

« Les troupes américaines n’ont pas seulement négligé de protéger les sites historiques et les biens culturels, elles ont participé elles-mêmes à ces exactions. Elles ont bombardé l’université de Bagdad, qui date du XIIIe siècle, transformé le site d’Ur en base militaire, creusant même des tranchées dans le sol. Les chars américains roulent à travers les vieilles rues de Babylone, un acte symbolique de vainqueur. ». Zainab Bahrani, PR d’Histoire de l’Antiquité à l’université de Columbia (New York) 2004.

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Depuis 1991, l’ancienne Mésopotamie, le berceau de la Civilisation, est dévastée avec un acharnement sans précédent : pillage des sites archéologiques et des musées, bombardement des édifices historiques, incendie de la Grande Bibliothèque et des Archives nationales, dégradation des pièces des musées causée par treize ans d’embargo? Deux ans après l’invasion du pays, la destruction des cités antiques et médiévales, et des sites archéologiques par l’Alliance anglo-américaine se poursuit à une échelle jamais connue dans l’Histoire, même au temps des invasions mongoles.

L’Occupant a transformé des villes antiques en camps militaires dont les engins enterrent à tout jamais les vestiges d’une Histoire – la nôtre – dont le puzzle ne pourra jamais plus être reconstitué. A la mi-janvier 2005, le quotidien britannique The Guardian a révélé un rapport alarmant du British Museum sur l’état du site de Babylone. Comment ce patrimoine unique, qui appartient à l’Humanité entière, peut-il être ainsi anéanti dans l’indifférence générale ?

BLACK-OUT TOTAL SUR LE PLUS GRAND GENOCIDE CULTUREL DE TOUS LES TEMPS

« Une culture du pillage s’est installée qui n’a jamais existé à cette échelle. En un an, nous avons perdu plus de sites archéologiques que jamais jusqu’à ce jour. » (Mac Guire Gibson, PR d’archéologie à l’Institut Oriental de l’Université de Chicago, cité par Tallek Harris).

La campagne de bombardements intenses par les agresseurs anglo-américains en 2003 avait détruit ou endommagé plusieurs monuments historiques, comme le Musée et la grande université Moustansirya de Bagdad bâtie au XIIIe siècle (juste avant la Sorbonne) et célèbre pour son horloge astronomique, et plusieurs musées en province. Depuis, les palais et les édifices religieux sont souillés et pillés à leur tour. Une célèbre photo parue dans un grand quotidien anglais montre des soldats américains en train d’arracher des fragments de fresques des murs d’une mosquée (leurs supérieurs les laisseraient rapporter quelques « souvenirs »).

Le PR Bahrani confirme qu’il n’existe pas de d’équivalent dans l’Histoire aux destructions qui se sont intensifiées depuis mars 2003 en Irak. Les principaux sites archéologiques connus sont pillés et saccagés à grande échelle les uns après les autres (Isin, Larsa?), sous les yeux des archéologues impuissants. Des groupes de professionnels creusent nuit et jour à la pelle ou à la pelleteuse, protégés par des hommes munis d’armes semi-automatiques. « Ce sont des bandes organisées qui travaillent à l’échelle internationale, appuyés par des financiers et des acheteurs potentiels » affirme l’assyriologue autrichien Walter Sommerfeld, qui précise que « ces fouilles sauvages sont encore plus catastrophiques que les pertes subies dans les musées. » (1)

Les articles de la Convention de la Hague de 1954 et la Convention de l’UNESCO de 1970 obligent les forces occupantes à protéger les biens culturels. C’est à l’inverse que nous assistons depuis 1991 : les agresseurs détruisent le patrimoine culturel irakien avec la bénédiction des plus hauts responsables américains. Quartiers anciens, mosquées et églises (2) centenaires (souvent remplies de fidèles) sont pilonnés et les sites antiques anéantis à tout jamais avec leurs trésors par les bombardements, les chars de l’alliance anglo-américaine et de ses mercenaires. Le génocide culturel accompagne le génocide du peuple irakien. Et ce n’est pas un hasard si un black-out total est imposé sur ces actes d’une rare barbarie perpétrés avec la complicité de l’ensemble de la « communauté internationale », et particulièrement les Occidentaux, qui ont définitivement décidé de situer l’origine de la civilisation en Grèce, et refusent de reconnaître que les récits de la Bible (le Déluge, la Genèse, le Cantique des cantiques?) et ceux des auteurs grecs comme Homère ou Esope ont leur source dans la littérature mésopotamienne, notamment l’épopée de Gilgamesh (qui commença d’être rédigée vers 2400) – de même que d’importantes découvertes scientifiques (astronomiques notamment) et mathématiques, souvent attribués à des Grecs (comme la relation de Pythagore), sont en réalité le fruit du génie mésopotamien. On trouve également chez les Mésopotamiens, avec plusieurs siècles d’avance, les prémices du monothéisme et de la philosophie (notamment des dialogues préfigurant ceux de Platon).

Des media aux ordres du Pentagone et des multinationales

Dans l’année qui a précédé l’agression, les reportages sur l’Irak diffusés dans l’ensemble de la presse écrite et audiovisuelle française se sont efforcés de présenter un pays sous-développé, un peuple arriéré, et les souffrances insupportables d’une jeunesse désoeuvrée, privée d’Internet et de boîtes de nuit par un tyran sadique. Pas un mot sur l’Histoire du berceau de l’humanité, sa richesse archéologique unique au monde, et le haut niveau d’éducation de sa population. C’est seulement lorsque l’on crût le pays « pacifié », que la chaîne culturelle franco-allemande Arte osa consacrer, au milieu de l’été, une soirée thématique sur la Mésopotamie et les pillages de ses trésors. Une autre émission diffusée en 2004 mettait en scène des dirigeants militaires américains soucieux de récupérer les pièces disparues et de rouvrir au plus tôt le musée de Bagdad afin de redorer leur image. De son côté, le quotidien « de référence » Le Monde n’en finissait plus de célébrer les bienfaits de la « Libération » du pays, avec des titres plus édifiants les uns que les autres : par exemple, la population grâce aux cybercafés ouverts par ses bienfaiteurs, pouvait enfin accéder aux sites pornographiques dont elle avait été privée si longtemps par leur dictateur (Le Monde, mai 2003) ! Bref, le peuple irakien accédait enfin à la « civilisation ». (3)

RAYER L’IRAK DE LA CARTE ET EFFACER L’HISTOIRE DE L’HUMANITE ?

L’Irak, qui recèlerait plus d’un demi-million de sites archéologiques (dont la moitié seulement avaient commencé d’être fouillés), est en réalité, comme l’a souligné le DR John Curtis, assyriologue du British Museum, « un seul immense site virtuel » : 90% de ses tells (colline) recèlent les vestiges de villages antiques, des vases, des statuettes, des bijoux, des sceaux-cylindres sumériens, et des centaines de millions de tablettes cunéiformes, dont seulement moins d’un pour cent aurait été retrouvé à ce jour. La seule perte de ces tablettes, qui racontent la vie de « nos plus lointains ancêtres connus en ligne directe » (Samuel Noah Kramer) est à elle seule une catastrophe irréparable

Le pillage est organisé par de puissantes organisations mafieuses au service de collectionneurs cupides, de galeries, voire de grands musées. On retrouve les pièces volées à Genève, Londres, Tokyo et New York. Or, « Un objet d’art qu’on a exhumé sans faire le relevé de la strate géologique qui lui est associée devient un orphelin de la chronologie. En outre, s’il est exposé sans mention de provenance archéologique, il est privé du contexte économique, social, idéologique et historique sans lequel l’Art ancien reste inexplicable » rappelle Roderick J. McIntosh (cité par Philippe Baqué).

S’attaquer à leur culture, surtout quand elle est aussi riche, est un moyen efficace d’humilier des peuples fiers de leur Histoire, comme le sont les Irakiens. Et quelle jouissance pour les occupants de contempler des membres de cette population, réduite à la misère et aux maladies, et souvent à la rue (en raison des destructions systématiques des habitations, comme en Palestine), piller avec honte leur propre patrimoine pour acheter quelques rares médicaments disponibles pour soigner les leucémies, maladies graves, blessures ou amputations causées à leurs enfants depuis 1991 par les armes à l’uranium appauvri, treize ans d’embargo et des bombardements qui n’en finissent pas.

DES VILLES ANTIQUES ET MEDIEVALES SERAIENT EN GRANDE PARTIE DETRUITES

« La guerre est une malédiction pour les archéologues » Troy Lennon

Peut-on imaginer les pyramides d’Egypte détruites ou simplement exposées à des tirs de missiles ou aux nouvelles bombes ultra-puissantes testées actuellement en Irak, sans que l’opinion internationale s’en émeuve ?

Outre ses sites archéologiques encore largement inexplorés, l’Irak possède (ait) des magnifiques monuments religieux plusieurs fois centenaires, des mosquées, des églises et des synagogues. Bagdad (« Cité de la Paix »), fondée en 762 par les Abbassides, devint rapidement un foyer d’une richesse économique et culturelle exceptionnelle. En 786, elle comptait deux millions d’habitants. Jusqu’à son invasion, Bagdad était restée dans notre imaginaire comme la ville légendaire de Schéhérazade, Aladin, Ali Baba et Simbad le Marin ; elle fascinait ses visiteurs grâce à ses multiples mosquées aux dômes recouverts de feuilles d’or et ses minarets décorés de mosaïques bleues, ses souks et ses habitations traditionnelles aux bords de l’Euphrate. L’architecture des palais construits récemment s’intégrait harmonieusement dans celle des villes anciennes. Aujourd’hui la cité des Mille et une nuits a été dévastée par les envahisseurs qui se sont installés dans les restes des anciens palais. Le seul précédent d’un tel désastre remonte à l’invasion menée par le petit-fils de Gengis Khan, dont les armées n’eurent « aucun respect pour la capitale politique de l’Islam. Ils profan(èr)ent les lieux de culte, se liv(rè)rent à un holocauste général et pill(èr)ent la ville. Les bâtiments (furent) détruits, les bibliothèques brûlées? » (Saint-Prot, p. 72).

Le personnel de la Bibliothèque Nationale et des Archives d’Etat, qui s’efforce de sauver les documents rescapés du grand incendie de mars 2003, travaille dans de très mauvaises conditions. Les archives ottomanes, qui retracent l’histoire du pays du XVe au XXe siècle, sont en grand péril. Après avoir été arrosées d’eau l’an dernier, elles commencent de pourrir et ont dû être stockées dans de grands réfrigérateurs souffrant des pannes d’électricité organisées dans le pays. Donny Georges, le nouveau directeur du musée de Bagdad, anciennement directeur général des recherches archéologiques du musée sous Saddam Hussein, se déclare prêt à tout, même « à serrer la main du diable et à collaborer avec lui » pour sauvegarder ses antiquités.

Our (près de Nassiriah), dont les fouilles témoignent d’une occupation remontant à l’époque d’Obeid (vers – 5000), est la ville sainte pour les trois religions monothéistes parce qu’Abraham y serait né. Elle est également célèbre pour ses ruines de quartiers d’habitations datant de la fin du IIIe millénaire, et surtout sa ziggourat (4), l’une des rares mises au jour sur les milliers que doivent recéler les tells d’Irak. Cet édifice antique unique a été touché à plusieurs reprises depuis 1991.

Fondée au VIe millénaire aux bords du Tigre, Ninive fut la capitale de l’empire assyrien. À son apogée (vers 700 av. J.-C.), c’était une des plus grandes villes ayant existé au monde, avec une population de 120.000 habitants et une superficie de 750 ha pour la seule ville basse. Le roi Sennachérib (704-681), fils de Sargon II, y fit bâtir un palais de quatre-vingts pièces abondamment décorées de sculptures, et reconstruire son mur d’enceinte de 12 Km. Assourbanipal (qui régna de 668 à 627) y fit ériger plusieurs palais, des temples et une immense bibliothèque regorgeant d’informations sur l’ancienne Mésopotamie. La stratigraphie révèle cinq niveaux anciens, du VIe au IIIe millénaire, « période cruciale pour la Mésopotamie » dont l’étude commençait seulement d’être abordée. À l’instar de beaucoup d’autres, le site avait déjà été bombardé, et dévasté par des professionnels du pillage lors de la 1e « Guerre du Golfe ».

Les occupants rasent les rares quartiers des villes anciennes qui ont échappé aux bombardements pour commencer la « reconstruction » du pays.

La vieille cité de Nadjaf, fondée au VIIe siècle av. J.-C., qui fut la capitale de l’empire assyrien, est l’une des rares villes mésopotamiennes mentionnées dans la Bible. Après que ses maisons traditionnelles, ses mosquées, ses madrasas (écoles coraniques), ses marchés, ses catacombes et son cimetière sacré (l’un des plus grands du monde, où sont enterrés plus de deux millions de personnes) aient subi les assauts des chars et des missiles, la ville est aujourd’hui livrée aux bulldozers. En effet, le « gouvernement » de Iyad Allawi, le Premier ministre importé dans les valises américaines, a décidé de terminer le « nettoyage » de la ville pour mettre en oeuvre l’un des premiers grands projets de « reconstruction » du pays qui profiteront aux amis du président américain. La démolition du vieux quartier a commencé dans un périmètre de 60 m autour du mausolée de l’Imam Ali (le gendre du prophète), l’un des principaux sites du Chiisme. Ce qui n’a pas été détruit par le feu l’est par les bulldozers des multinationales américaines.

Selon un scénario bien rôdé (en Afghanistan, en Palestine?) que les consommateurs de media acceptent sans broncher, prétexte est pris de la recherche d’un individu (dont l’existence même peut être questionnée) pour raser une ville ou un quartier et massacrer ses habitants. (Cette politique de terreur, qui a pour but de soumettre les populations, n’a abouti qu’à intensifier la Résistance). Comme ceux de Nadjaf, les monuments historiques et religieux de Falloudjah, « la ville aux cent mosquées », ont subi des bombardements intensifs. Selon des membres de la Croix-Rouge, toutes les mosquées auraient été touchées. Des informateurs de Dhar Jamail, l’un des rares journalistes indépendants présents sur le terrain affirment que la ville de Falloudjah aurait été quasi totalement rasée, en partie par de nouvelles armes de destruction massive testées à l’occasion. D’une manière générale, tous les témoins des exactions commises par l’Occupant sont susceptibles d’être éliminés physiquement, sans le moindre écho dans la presse internationale.

Les méthodes utilisées en Irak sont similaires à celle d’Israël en Palestine. Cependant, les destructions commises par les raids israéliens contre les centres historiques des villes millénaires comme Bethléem, Hébron et Naplouse ont été reconnues comme « crimes contre le patrimoine commun de l’Humanité » par l’UNESCO en 2002.

LA LEGENDAIRE CITE DE BABYLONE RECONVERTIE EN CAMP MILITAIRE

« Babylone est sans conteste l’un des sites archéologiques les plus important au monde, et les dégâts causés par le camp militaire un nouveau coup porté au patrimoine irakien. » DR John Curtis, Directeur du département des Antiquités du Proche-Orient au British Museum.

De nombreux sites antiques ont été transformés en camps militaires. Ainsi, Babylone (« la Porte des dieux ») a été occupée par deux mille soldats américains dès les premiers jours de l’invasion du pays – au prétexte de la protéger – en dépit de l’opposition de l’ensemble de la communauté internationale des archéologues.

Babylone, dont l’origine remonte à la préhistoire, est l’une des cités au monde les plus anciennes et les plus riches. Sous le roi Hammourabi (1792-1750 av. J.-C.), la capitale de la Mésopotamie connut un important essor littéraire, artistique, scientifique et juridique (avec le code Hammourabi). Sous le règne du chaldéen Nabuchodonosor (605-562), qui reconstitua un empire qui s’étendait jusqu’à l’Egypte, Babylone devint la plus belle capitale du monde. Elle était peuplée de plusieurs centaines de milliers d’habitants, dans un pays qui en comptait vingt-cinq millions. En partie grâce à son port sur l’Euphrate, « la Babylonie domin(ait) toute l’activité économique internationale de l’époque » (St Prot, 33). C’est dans sa bibliothèque que les prêtres Hébreux se seraient initiés aux connaissances des mages chaldéens, et recopié les tablettes qui leur auraient inspiré les futures légendes bibliques (idem, 34). La ville, qui avait été conquise par Cyrus autour de 538 av. J.-C., fût en partie détruite en – 482, lors de révoltes contre les occupants Perses. Elle était restée l’une des plus importantes cités du monde pendant plus de mille ans.

Babylone avait impressionné l’historien grec Hérodote (484-420 av. J-C.), et Alexandre Le Grand, qui en avait fait la capitale de son Empire et qui y mourut en – 323 avant d’accomplir totalement son projet de la restaurer. Les écrits hellénistiques témoignent de l’admiration des Grecs pour son architecture, ses gigantesques doubles remparts en briques d’une périphérie de 20 Km, les luxuriants jardins suspendus de la reine Sémiramis (l’une des sept merveilles du monde) (5), son pont sur l’Euphrate, les réseaux de ses rues et le sanctuaire du dieu Mardouk. « Babylone était le coeur spirituel et intellectuel de toute la Mésopotamie, rayonnant sur le monde civilisé. » (Salvini, Babylone, p.3).

Les fouilles, entreprises au milieu du XIXe siècle, avaient déjà permis de mettre au jour de nombreux édifices, tablettes et objets antiques divers, mais la plus grande partie de cette ville immense, aux strates multiples depuis l’époque préhistorique, restait encore à découvrir, enfouie sous terre.

Babylone fut en partie reconstruite sous Saddam Hussein dans les années 80’ (les projets de réhabilitation dataient de 1938) ; le président voulait lui restituer sa grandeur originelle et en faire l’un des grands sites touristiques du pays. (Cette initiative fut tournée en ridicule par les Occidentaux, les mêmes qui avaient célébré avec enthousiasme la réhabilitation de Persépolis par leur ami le Shah d’Iran). Les travaux, entrepris avec l’aide de l’UNESCO, durent cesser avec la 1e guerre du Golfe, mais on pouvait déjà admirer de nouveau les édifices les plus importants, notamment les palais de Nabuchodonosor et la plus grandiose des huit portes de la ville, celle d’Ishtar (la déesse de l’amour et de la guerre), revêtue de briques bleues émaillées ornées de frises de dragons et de taureaux dorés en léger relief (6).

« C’est comme si les sites des pyramides d’Egypte ou celui de Stonehenge étaient devenus des camps militaires » (DR John Curtis, Janvier 2005)

Aujourd’hui, la cité légendaire, située à 90 Km de Bagdad, est devenue le « camp Babylone » (sic), occupé principalement par des troupes polonaises depuis septembre 2003. Les équipes internationales d’archéologues ont été contraintes d’abandonner leurs fouilles au début de l’invasion. Le camp occupe 150 ha au milieu du site archéologique de 900 ha ; il est installé autour de la partie centrale de l’ancienne cité, près de la ziggourat.

Le nouveau ministre de la culture de l’Irak sous Occupation lui-même, Mofeed al-Jazaeri, réclame depuis des mois l’évacuation totale du site. Dans une interview à l’Agence Reuters en décembre 2004, il a décrit certains des dommages irréparables causés par les équipements lourds, les hélicoptères et autres engins militaires, insistant particulièrement sur le problème des hélicoptères qui survolent en permanence la cité antique. Leurs ailes endommagent les murs fragiles bâtis en briques d’argile. Une piste d’atterrissage a été construite au coeur de l’ancienne cité, sur les ruines antiques, après « nettoyage » du terrain (imaginons un instant l’Acropole d’Athènes transformé en aéroport militaire?). Plus loin, des chars sont parqués dans les ruines d’un théâtre grec de l’époque d’Alexandre le Grand. A proximité du théâtre se trouvent un bunker de béton et des containers de fuel dont les fuites ont contaminé l’environnement.

Le nouveau ministre indiquait encore : « Nous ne connaissons pas la hauteur des dommages dus à la présence militaire, car nos experts ne sont pas autorisés à entrer sur le site. Mais nous avons reçu des informations que plusieurs monuments ont été endommagés ». Ainsi, des toits et des murs de temples antiques (comme ceux de Ninmh et Namou (VIe siècle av. J-C) se sont effondrés. Le palais de Nabuchodonosor, jadis entouré des fameux jardins suspendus aurait également été endommagé.

La firme américaine Kellogg, Brown & Root (KBR), une filiale d’Halliburton (la multinationale liée à Dick Cheney), a entrepris des travaux de creusement et de construction autour de la ville, entraînant de nouvelles dévastations sans que le ministre soit consulté ni informé des motifs de ces travaux. Ni les officiers polonais qui occupent le site, ni les représentants de KBR n’ont accepté de répondre aux questions du ministre. De même, les plaintes déposées auprès de Paul Bremer et du précédent commandant de l’alliance, le lieutenant général Ricardo Sanchez, pour qu’il soit mis un terme à ces exactions, n’avaient jamais abouti.

Le rapport alarmant du British Museum sur les destructions commises par les troupes d’occupation à Babylone.

Sur la demande des experts irakiens, le DR Curtis, directeur des Antiquités du Proche- Orient du British Museum, et qui dirige des fouilles en Irak depuis plusieurs décennies, a pu se rendre pendant deux jours et demi sur le site en décembre 2004. Si on ne lui a pas accordé le temps de faire un rapport exhaustif, il a néanmoins pu établir sur 14 pages une liste indicative des « dommages substantiels » causés par l’occupation militaire dont un résumé a été publié dans le quotidien britannique « The Guardian ». Lord Redescale, président de la commission parlementaire britannique d’archéologie, a qualifié les informations contenues dans le rapport de « terrifiantes ».

Le rapport, qui contient plusieurs cartes détaillées, apporte en effet des informations précieuses sur les dévastations commises par les troupes d’Occupation. Ainsi, la Voie processionnelle antique, l’une des principales routes pavées de la ville, vieille de 2.600 ans, a été écrasée par les engins lourds qui circulent sur son fragile pavement de briques. Pis, les fragments archéologiques récupérés, contenant également des ossements, ont été mélangés dans des milliers de sacs de sable servant à des fins militaires. Mais on devait tomber de Charybde en Scylla car, après que l’on eut mis fin à cette pratique, on utilisa des tonnes de « gravier » (des fragments archéologiques) ramassé sur un autre site pour couvrir une surface de 300.000 m2 contaminant ainsi le site.

Ce gravier a été compacté et parfois traité chimiquement à l’aide d’un dérivé du pétrole pour la construction de la piste d’atterrissage des hélicoptères et des parkings destinés aux véhicules militaires. Le long de la piste, des blocs énormes de béton ont été posés pour protéger l’aéroport d’éventuelles attaques. De nombreuses tranchées ont été creusées à proximité de monuments antiques (anéantissant à tout jamais des milliers d’antiquités), dont la grande Ziggourat identifiée comme la « Tour de Babel » décrite dans la Bible. Du fioul suintant des réservoirs des blindés non entretenus s’infiltre lentement dans les différentes strates archéologiques.

En outre, un nombre important des fameux dragons (mushussu) ornant les briques émaillées de la porte d’Ishtar (qui sont d’origine à cet endroit) ont été endommagés à la suite de tentatives d’arrachage des murs de l’édifice. De nombreuses briques signées par le souverain Nabuchodonosor II (selon la tradition mésopotamienne) ont été volées ou brisées.

Le DR Curtis demande qu’une enquête internationale soit diligentée par des experts en vue de dresser un bilan complet des destructions causées par les troupes d’Occupation, et presse le ministre irakien de la Culture de tout faire pour obtenir un classement rapide du site par l’UNESCO. Outre Babylone, les autorités irakiennes avaient demandé en 2000 le classement en priorité des sites de Mosul, Nimrud, Ashur, Samarra, Al-Ukhaidar, Wasit et Ur.

Conformément aux pratiques journalistique en vigueur en France, où la déontologie propre à la profession a presque disparu, les media ont « glissé » sur l’information. Ainsi, une chaîne française s’est contentée de montrer des soldats polonais, visiblement ivres, en train de chevaucher le fameux lion monumental en basalte de Babylone.

Faire table rase de notre Histoire

La cité a une connotation péjorative, de confusion, de chaos en raison de l’épisode de la Genèse sur la Tour de Babel (11,1-9), et surtout celui de la déportation des Juifs à Babylone par Nabuchodonosor II, après la prise de Jérusalem en 597 av. J.-C. Des textes du Ier siècle de notre ère la dépeignaient comme « l’adversaire de toujours, l’ennemi du peuple élu ». Ainsi, « la métaphore de Babylone, la ville du diable, se prépare à traverser les millénaires » (Salvini, pp. 12-13). C’est pourquoi la nouvelle destruction de la ville « maudite » serait parfois interprétée comme une revanche historique.

Toutes les villes du pays, où l’ancien et le moderne sont étroitement imbriqués, sont menacées de destruction par les bombardements. La plupart des villes antiques comme Samarra (célèbre par sa mosquée, déjà endommagée par des missiles en 1991) font l’objet de destructions par les troupes occupantes. Seule la ville d’Hatra (70 ap. J-C), site parthe (le seul site irakien classé par l’Unesco) serait protégée.

Le génocide culturel accompagne le génocide du peuple irakien, avec la complicité scandaleuse et inadmissible de l’ensemble de la « communauté internationale ». Tout se passe comme si la destruction méthodique de l’Irak avait pour but de l’effacer, non seulement de la carte géographique, mais aussi de l’Histoire de l’Humanité, par tous les moyens : incendie de sa bibliothèque et de ses archives nationales (en 2003), destruction de ses monuments antiques et médiévaux, et de ses sites archéologiques contenant des millions de tablettes d’argiles racontant tous les aspects de la vie de nos plus lointains ancêtres.

Dès que l’Irak aura été « nettoyé » de sa population et de ses antiquités (détruites ou écoulées sur le marché de l’art, dépouillées de leur valeur archéologique), des sociétés liées aux membres du gouvernement Bush, comme Halliburton, « symbole du capitalisme de compères à l’américaine » (I. Warde) vont entreprendre un immense chantier de reconstruction très lucratif, cette fois à l’échelle du pays. Dans ce « nouvel Irak », où l’on aura achevé de faire table rase d’un passé encombrant, les sociétés pétrolières US et britanniques pourront enfin prospérer en toute quiétude.

En l’absence de toute réaction réelle de cette vague entité nommée « communauté internationale », jusqu’à présent extrêmement complaisante à l’égard des très graves et permanentes violations du droit international par les Etats-Unis (qui en font le principal « Etat-Voyou » du monde – et peut-être bientôt de l’Histoire), les faucons de Washington pourront poursuivre en toute impunité leurs génocides humanitaires et culturels en Syrie, en Iran et ailleurs, et imposer définitivement leur « démocratie » et leur « culture » à la planète entière.

Joëlle PENOCHET, anthropologue et journaliste

Le prochain volet sera consacré au génocide de la population irakienne depuis 1991, faisant suite aux précédents articles écrits avant l’invasion de mars 2003.

2005 Reproduction encouragée, permise seulement pour usage équitable – reproduction only permitted for fair use.

Cet article comprend 35.000 signes.

(1) Cf. Joëlle PENOCHET : Vandalisme et pillage en Irak, berceau de la civilisation, Combat-Nature n° 143, novembre 2003, http://http://www.arabesque.org?Cdoss=3&Cart=18

(2) En ce qui concerne les attentats perpétrés contres les églises, la communauté chrétienne est persuadée qu’ils ne sont pas le fait d’autres Irakiens, mais de provocateurs étrangers ou d’anciens détenus de droits commun irakiens (libérés en totalité par les envahisseurs dès leur installation) recrutés par l’Occupant pour créer des conflits intercommunautaires. Nombre des enlèvements d’otages permettrait à ces criminels de s’enrichir en se drapant d’oripeaux politiques, tout en permettant à l’alliance anglo-américaine de criminaliser la Résistance irakienne aux yeux de l’opinion internationale.

(3) Notons que la presse écrite et audio-visuelle française apparaît être l’une des plus désinformatrives d’Europe et la plussoumiseauDiktat de lobbiesétrangers ; la qualité des informations est au plus bas et la propagande américano-israélienne y bat son plein. En Grande-Bretagne, par exemple, le public dispose d’informations de qualité et plurielles, grâce notamment aux quotidiens The Independant, The Guardian, à certains magazines comme The Newstatment, et à la BBC.

(4) Édifice monumental à étages reliés par un escalier, surmonté d’un temple dédié à un ou plusieurs dieux. La ziggourat de Babylone, nommée « Etemenanki » (« La Maison (qui est le) fondement du ciel et de la terre »), formait un carré de 90 m de côté à sa base ; elle comportait sept étages sur une hauteur de 90 m. Elle était entourée d’une enceinte de plus de 400 m de côté (Salvini, p. 98).

(5) Dans un environnement aride, Nabuchodonosor II avait fait aménager pour son épouse, la princesse Amytis, un jardin paradisiaque destiné à rappeler à la reine la région luxuriante dont elle était originaire, la Médie. Les Jardins suspendus de Babylone, avec ses arbres fruitiers, ses fleurs exhalant des senteurs exotiques, ses cascades, ses animaux sauvages, ont été décrits par les auteurs antiques, Strabon ou Philo de Byzance, comme l’une des sept merveilles du monde. L’étagement des jardins donnait l’impression qu’ils flottaient dans l’espace. Un escalier de marbre reliait les terrasses sur plusieurs étages soutenus par des voûtes et des piliers non visibles. Ces lieux de promenades étaient ombragés par des allées de palmiers. Des systèmes hydrauliques sophistiqués (puits, conduites de drainage, ruisseaux artificiels?) permettaient d’irriguer en permanence les jardins grâce aux eaux de l’Euphrate. En réalité, il semble que la plupart des villes babyloniennes auraient possédé des jardins suspendus.

(6)L’original est au musée de Berlin. Il a fallu des années aux spécialistes pour retrouver les techniques antiques, notamment la fabrication du bleu intense caractéristique des briques émaillées ornant la porte d’Ishtar, déesse de l’Amour et de la Guerre.

Principales sources
ANDRE-SALVINI Béatrice : Babylone, PUF, Collection « Que sais-je ? », Paris 2001.
ASSAF, Mika : La mémoire volée, retour à Bagdad, Arte GIE, Coup d’oeil 2004.
BAHRANI, Zainab : Days of plunder, Coalition forces are doing little to prevent the widespread looting and destruction of Iraq’s world-famous historical sites, The Guardian, 31 août 2004.
BAHRANI Zainab : Looting and Conquest, The Nation, 14 mai 2003. http://www.thenation.com
BAQUE, Philippe : Enquête sur le pillage des objets d’art, Le Monde Diplomatique, janvier 2005, p. 19.
BENJAMIN, Jean-Marie : Irak, l’apocalypse, Favre, Lausanne, 1999.
BOTTERO Jean : Babylone et la Bible, Hachette, Littératures, collection « Pluriel », Paris, 1994.
BOTTERO Jean : La plus vieille religion, Gallimard, Coll. Folio Histoire, 1998.
BOTTERO Jean : L’écriture, la raison et les dieux, Gallimard, Coll. Folio Histoire.
CURTIS, John : Report on the meeting at Babylon 11-13th December 2004, British Museum, http://www.thebritishmuseum.ac.uk/i… .
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Source: http://bellaciao.org/fr/article.php3?id_article=12866

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